Les Chroniques de Candy

BAAB

“ Mais ce n’est pas totalement en français ? Demandai- je, soudain inquiète.

- Mais si ! C’est l’avantage pour les gens qui ne comprennent pas l’anglais !

  • Et les chansons ? Je m’attendais déjà au pire.
  • Bah aussi. C’est bien, non ? ”

 

Vêtue très sobrement pour une fois - pantalons pattes d’éléphants en lycra, semelles compensées, un tshirt I LOVE DISCO en paillettes et une veste à fleurs - je rentre dans le métro, en compagnie de mon second ange gardien et de mes préjugés, pour aller assister à la première avant première de Mamma Mia au théâtre Mogador. La soirée spéciale Fans, dont les billets sont collectors. C’était la première fois que les artistes jouaient en public. Abba en français, c’est comme un slip mal taillé. Cela peut être utile mais hautement désagréable. Mais j’ai appris une leçon de vie lors de cette soirée. Il ne faut pas se fier aux préjugés, car des fois, ça peut être bien pire. Pour une soirée spéciale fans, j’étais la seule personne lookée, malgré le fait que je me suis habillé en trois minutes avec une garde robe limitée. Les autres étaient tous habillés à la mode hétérosexuelle. Dans la salle, j’ai quand même remarqué que le léopard devient à la mode chez les hétéros, deux ans après que les folles s’y soient intéressées - j’ai compté 3 chemisiers, 5 écharpes et 2 blousons - et les marinières ne se démodent pas. Avant le début du spectacle, la dame qui nous demande d’éteindre les téléphones nous met : il y aura sur scène lycra, pattes d’eph et talons compensés. Tiens, on parle de moi ?

 

Le spectacle commence avec “I have a dream” traduit en “Je veux partir”. Cauchemardesque. S’ensuivent tous les autres tubes d’Abba. Mal traduits en français. Les paroles étaient comme les tenues des spectateurs : plates et sans intérêt. Je n’ai toujours pas compris pourquoi les chansons ont été traduites. Pour être comprises par les francophones ? Allons, tout le monde connait par coeur la discographie complète de ce groupe légendaire. Prenons un exemple concret. Dans “Priscilla Folles du Désert”, en VF, les dialogues sont en français et toutes les chansons - la majorité de ABBA -  sont en anglais. Le film a été adulé par les folles au niveau intergalactique, personne ne s’en est plaint ! “ Mamma Mia ”, c’est comme si on avait pris Armande Altai pour coacher Paris Hilton chantant du Barbara en allemand lors du passage du ballet de Béjart à Berlin. L’intérêt des chansons d’Abba ne réside pas dans la compréhension totale des paroles, mais dans la musicalité des couplets qui s’enchainent. Ma chanson préférée, “Lay all your love on me” a été massacrée et défigurée en “Laisse moi t’aimer un peu”. Comme l’a dit DJ Gilou, l’opinion suprême en matière de musique, cela fait penser à Mike Brant. Le reste des hits furent aussi catastrophiques.  “Gimme Gimme Gimme” passe si on écoute qu’une parole sur dix et qu’on se concentre exclusivement sur les quelques paillettes qui ornent les costumes. “Thank you for the music”, je me passerai de commentaires. Sur “Voulez vous”, on n’entendait rien tellement la musique couvrait tout, et c’était très bien ainsi. Le comble de l’ignoble fut atteint avec “Mamma Mia”, une horreur sans nom. Après avoir vainement essayé de m’ouvrir les veines avec la fermeture éclair de ma veste à fleurs, j’ai pensé au vieux conseil de ma grand-mère : lorsqu’on se fait violer, il faut fermer les yeux, respirer et apprécier le moment, car on ne peut rien faire d’autre. Assis à la place 29 du rang K, c’est ce que j’ai fait. Je me suis laissé porter, j’ai chanté les chansons en VO dans ma tête, et j’ai survécu au génocide de la discographie qui a bercé mon enfance. Dans la première partie, tous les tubes passent, ce qui fait que pour ceux qui ne connaissent pas trop bien les chansons les moins connues, ils s’ennuient un peu dans la deuxième partie. Avec “The Winner takes it all” ou “S.O.S” traduits pour un répertoire  par Ilona-Mitrecey-ein, ceux qui connaissent les chansons s’ennuient également.

 

Heureusement que les acteurs sont talentueux. Leur jeu était excellent. Evidemment, rien à voir avec le film. Je ne m’attendais pas à voir une actrice à la hauteur de Meryl Streep  non plus ! Petite note pour l’actrice qui joue Tania, la millionnaire nymphomane, qui surpassait tous les autres rien que par sa présence. Coté voix,  les chanteurs-acteurs étaient comparables à des spéléologues sur scène : ils descendaient toujours  à un niveau plus bas. A chaque fois qu’ils montaient dans les aigus, on avait l’impression d’entendre les gémissements mal doublés d’un film de Clara Morgan. Le décor était inexistant - deux murs blancs pour évoquer un paysage vaguement grec. Coté costumes, j’avais l’impression qu’ils ont voulu concurrencer le mauvais goût de leur public, sauf pour Super Trooper et ceux de la scène finale, où satins, ailes d’Isis, strass, pattes d’éléphants, collants brillants et talons compensés argentés et dorés fusaient de partout. En chorégraphie, j’ai déjà vu mieux. Une bande de masses de muscles habillé en combinaisons de plongée violettes qui font des grands écarts en sautant ? Rien d’extraordinaire. C’est normal de pouvoir le faire à 25 ans. Lorsqu’on le fait à 50 ans, comme Madonna, là on peut parler de magnificence et d’exploit. La scène finale, avec les costumes et les jeux de lumières, était assez réussie. Bref, le seul moment que j’ai apprécié, c’est lorsque cela s’est terminé.



28/06/2012
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