Les Chroniques de Candy

Brisons les clichés (ou pas)

Il est vrai qu’être gay n’est pas tout le temps facile à vivre, peu importe où l’on se trouve sur la planète. Mais il ne faut pas pousser tata dans les orties. Les gays et les folles à l’île Maurice ne sont ni opprimés, ni persécutés, ni tués, contrairement à ce qui a été raconté dans un magazine gay ce mois ci. Par expérience, je vais vous raconter une journée type dans la vie d’une jeune folle sur cette île paradisiaque.

 

Elle se réveille à neuf heures avec une gueule de bois dans sa chambre aux murs lavande et vert anis. La chambre a été complètement refaite par ses petites mains de fées. Elle sort du lit et se retrouve en face d’un miroir taille XXL placé stratégiquement sur le mur opposé et s’étonne de sa beauté et sa fraîcheur matinale. Elle va faire sa toilette, se parfume, traverse le couloir et descend les escaliers - couleur orange flashy, encore une fois peints par elle - telle Gloria Swanson dans la dernière séquence de Sunset Boulevard. Elle se fait un thé, mange des céréales allégées tout en écoutant les infos et lisant Vogue. Ensuite, elle remonte dans sa chambre, ouvre sa penderie, qui occupe la moitié de sa chambre de 25 mètres carrés. Elle choisit sa tenue pour la journée parmi sa tonne de possessions. Elle choisit aussi les bijoux, les lunettes de soleil et le sac assortis. Elle va prendre un bain aux huiles essentielles, s’habille et remonte dans sa chambre changer de tenue, car finalement son choix premier ne lui plait plus. Elle se change, masque ses cernes avec un léger fond de teint. Elle se fait un brushing et un lissage en prenant soin de ne pas trop chauffer ses cheveux décolorés en blond platine. 

 

À midi, elle quitte finalement la maison, accompagné de son grand sac et prend le bus pour aller faire un coucou à sa mère. Évidemment, sur sa route, les gens se retournent, d’autres s’évanouissent, ou encore, ils la sifflent, la prennent en photo... C’est sa, être fabuleuse, bien maquillée, habillée avec goût et marchant comme Heidi Klum lors de la finale du show. Après avoir salué sa maman, qui ne se doute aucunement de ses orientations, la folle prend un autre bus pour traverser la moitié de l’île et aller voir sa soeur au Jardin Botanique. Elles grignotent des barres de céréales et boivent du Amarula en se plaignant de leurs existences mornes tout en prenant le soleil. Au fond de leur déprime, elles se font un photoshoot. Des fois, d’autres soeurs se joignent à elles pour s’occuper sainement : Boire, parler, se lamenter, chanter, coller des paillettes sur des t-shirts, créer des bijoux, fumer, etc. Là aussi, des gens passent et leur jettent des regards inquisiteurs, d’autres sourient timidement, mais elles ne se font aucunement agresser ou insulter. Les gens sont plutôt en admiration, voire adoration devant elles.

 

Elles vont ensuite faire du shopping dans des petites boutiques méconnues de la populace et où l’on trouve des choses uniques et délirantes. Ne sachant quoi faire le reste de la journée, elles s’en vont au cinéma, en espérant y rencontrer des êtres dignes d’elles. Mais toujours rien, que le peuple partout. A la fin de la séance, elles se disent au revoir péniblement, se promettent de se retrouver le lendemain avant de se séparer pour la soirée. A chaque fois, c’est le même drame, pour ces deux êtres unis dans l’esprit. C’est bien plus dur de survivre à ce genre de séparation tous les jours que de subir des insultes ou de l’oppression comme le décrit l’article du magazine. Mais elle se remet de ses émotions sur le chemin du retour, et une heure après, elle est chez elle. Elle parle à ses parents, ses frères et soeurs. Elle va voir ses oncles, tantes, cousins et cousines, parle, rigole, regarde la télé, prend l’apéro. Puis, visite obligée à la grand mère, qui n’habite guère plus loin. Une dame digne et adorable. La famille ne l'opprime pas du tout, pas plus que la société ou autres concepts abstraits. Elle va dîner, des fois chez elle, des fois chez les cousins qui l’invitent à l’improviste. 

 

Elle rentre chez elle, déconne avec sa mère et son père, et après que ces derniers soient partis au lit, la folle s’en va chez son cousin le plus proche qui est aussi son confident, car ils sont de la même fibre. Ensemble, ils regardent Le Diable s’habille en Prada ou Love and other Disasters en buvant du Rhum local. A trois heures du matin, la folle retrouve son lit et s’y jette, imbibée d’alcool.

 

Et elle se réveille à neuf heures avec une gueule de bois dans sa chambre aux murs lavande et vert anis...



28/06/2012
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