Les Chroniques de Candy

Calamité sur scène

Comment transformer une soirée qui s’annonçait sublime en catastrophe niveau 10 sur l’échelle de Richter ? Je vous explique.

 

J’étais invitée à la générale de Faust à l’opéra Bastille. J’avais même prévu ma tenue à l’avance (une cape en cachemire et laine noire, t-shirt vieux rose, des gants Rita Hayworth noirs, slims et talonnettes. Et soudain, en plein après midi, on me rappela que j’avais promis d’aller à Bobino pour L’Eurovartovision. Déchirée entre mon plaisir et la fidélité, je cède pour cette dernière. Et ce fut la fin de ma soirée de rêve. Accompagnée de trois autres amis qui ont de l’humour, on se dit que ce sera une parodie, donc cela risque d’être drôle.

 

Nous arrivons devant Bobino, et nous entrons. Là, on nous met un bracelet en raffia jaune (qui n’allait pas du tout avec le reste de ma tenue - tunique parme, veste en tapisserie et jeans blancs). C’est pour quoi ? C’est pour qu’on nous reconnaisse en tant que V.I.P au bar. Dans les soirées où je vais généralement, les V.I.Ps sont reconnus au bar, nul besoin d’un morceau de corde affreux. Au bar, quelques célébrités : Gaultier, Vincent McDoom, Altai et d’autres de la même catégorie. Les quatre élégantes que nous étions se sont rapprochés entre nous, faisant des constats (oui, nous ne disions pas de méchancetés) sur les autres invités. Un verre après, les lumières s’éteignent.

 

Deux drag queens arrivent sur scène. Une en robe jaune crinoline, une autre en tenue du XVIIème, dans les tons cuivrés. Elles se mettent à parler, et ma copine et moi s’échangions des regards atterrés. Pourquoi n’ont elles pas gardé leurs voix normales ? En optant pour ces voix aiguës et mal perchées, elles agressaient nos oreilles. Leurs blagues et autres vannes étaient à la hauteur des pâquerettes sauvages. Deux minutes après le début, je regarde ma montre, me demandant si c’était toujours possible d’aller à la générale. Malheureusement, ce n’était plus possible. Ma fidélité me perdra un jour. 

 

Le show ? Comme l’Eurovision. Ici, il y avait dix sept pays qui s’affrontent. Avec des chansons de l’Eurovision des années précédentes. Moi qui croyais à des parodies, des textes réécrits à la manière des Caramels fous, rien du tout ! Des chansons venues directement de ce concours qui nous a malheureusement révélé Céline Dion.  Le premier numéro donne le ton. La fille chante faux. Elle gigote sur scène, le manque de répétition est flagrant. Oui, mais l’Eurovartovision, c’est burlesque, cela ne se prend pas au sérieux. Certes, comme tous les numéros et shows de Drag Queens. Mais un minimum de préparation, une choré qui tient la route, cela ne ferait de mal à personne. Burlesque ne veut pas dire mauvais, cela veut dire burlesque. La fille fait un grand écart, et la ma copine me fait “Chez nous, un grand écart, c’est pour rattraper un numéro qui foire”. Je pense que c’était le cas ici, sauf que cela n’a rien rattrapé du tout. 

 

Les numéros se suivent et se ressemblent. La même choré dont j’avais l’impression que c’était préparé dix minutes avant l’entrée en scène partout. Et je ne parle pas des costumes. Des nuisettes, des combinaisons, des hauts à paillettes bas de gamme qui ne brillent même pas, des slips, des serviettes. Et les chansons ! Ah, que du bonheur ! Des paroles très profondes. “Il y a autant d'amoureux que d'étoiles au ciel, Il y a autant d'heureux que nous sous le soleil”, pour n’en citer qu’un couplet dans tout le spectacle. Ah, Gounod, pardonne moi ! Je plains le jury, qui devait départager ces nombreux numéros qui avaient la même chorégraphie, la même non recherche au niveau de costumes et la même musique qui fait saigner les oreilles. Je vous épargne les films de présentation de chaque numéro (qui n’avaient strictement rien à voir avec les prestations elles mêmes) et toutes les fois où les micros ne marchaient pas. Par contre, pour noter l’originalité des numéros, ils n’ont pas dû avoir d’énormes problèmes. Grèce, par exemple, qui ont chanté “OPA” en slip. Ma copine m'a expliqué qu'en fait ils recyclaient leur costume d'un autre spectacle, Sauna, faisant par la même occasion leur promo). Quatre mecs en sous vêtements, si ce n’est pas cliché à mort, moi j’ai une garde robe vide. A un moment, ma copine et moi avons décidé d’admirer le plafond noir, qui présentait plus d'intérêt que la scène. “Ici, tout est en live!” s’exclama une des deux énergumènes de présentatrice. “Ah on l’avait remarqué!” me chuchota mon amie. Et un public bas de gamme, j’avais jamais vu cela ! Ils hurlaient, parlaient, lançaient des vannes aux présentatrices. Cela aurait pu être sympa si les vannes étaient drôles et pas lourdes.

 

Mais parmi ce ramassis d’à-peu-près, il y avait quand même trois numéros qui étaient biens. “Hora Din”, de la Moldavie. Elle chantait bien, elle avant les bonnes vibrations au niveau vocal, le costume traditionnel impeccable. Dommage que les deux moutons qui l’accompagnaient ne faisaient pas assez moutons. Pour les rendre un peu plus mouton, cela aurait demandé un peu plus d’imagination et guère plus de sous. L’Allemagne était drôle en diable aussi. Et dire qu’ils n’ont eu que deux jours pour préparer, car ceux qui étaient prévus avant s’étaient désisté à la dernière minute. Comme quoi, ou l’on a du talent, ou l’on en a pas. Et l’Andorre, mon préféré. “Sense Tu”, chantée par les Laguna Negra. La fille avait une voix prenante et profonde, j’en étais clouée. Une recherche au niveau du costume : une grande robe à pan, d’ou ont surgi les deux autres danseurs. Une coiffe en miroir strassé qui n’était pas sans rappeler la Gorgone. Ils ont gardé le meilleur pour la fin, une finale en apothéose pour un spectacle plus que médiocre. 

 

Comme je n’en pouvais plus de tant de calamités vocales, musicales et vestimentaires, je suis partie à l’entracte. Ne pas savoir qui va gagner n’allait pas m'empêcher de dormir, ne pas avoir vu Faust pour “ça” par contre, me ronge de l’intérieur. Je suis sortie sans passer par le bar. Et oui, je n'allais pas me faire rincer avec l’argent qui devait revenir à des associations de luttes contre SIDA. C’est à se demander combien est reversé à ces associations, sachant que la plupart des membres du jury (très nombreux) n’ont pas payé, et les V.I.P avaient open bar. Alcool cheap à l’image du public et du spectacle, certes, mais open bar quand même...



28/06/2012
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