Les Chroniques de Candy

La coupe du monde m’aura été bénéfique cette fois ci. J’ai finalement compris que depuis 10 ans, l’image que je m'étais faite après avoir vu un match entre le Brésil et l’Argentine était erronée. Le match avait duré une minute et vingt-trois secondes, puis les joueurs s’étaient enculés à n’en plus finir dans les vestiaires, sur le terrain, dans les gradins, dans le car, sous la douche et j’en passe. C’était un match diffusé par Falcon Studios.

Ce n’est qu’hier que je me suis rendu compte de la triste réalité. Assis devant la télé (nul n’est parfait), je regardais pleins de mecs assez mal habillés courir après un ballon. J’attendais les vestiaires et les douches, mais en vain. Après dix minutes, j’ai posé la question à une amie, et c’est la que mes illusions ont été brisées. Le foot est loin d'être aussi passionnant que le tricot. (Le foot de chez Falcon ressemble au tricot. On enfile, puis il y a toujours les mêmes mouvements, et lorsqu’on s’en lasse, on change de main). Le principe du football de FIFA est tout autre : courir après un ballon, essayer de taper dedans avec les pieds et marquer un but. S’ils marquent chez l’adversaire, c’est mieux. Il y a deux équipes, l’une aussi ringarde que l’autre. Là, en l'occurrence, c’était Le Mexique contre l’Argentine. Le Mexique était en T-shirt vert et l’Argentine en T-shirt bleu. Les deux équipes avaient du chiffon mal coupé en guise de shorts. Les pauvres. Même payée des millions, j’aurais refusé de sortir de chez moi en pareil accoutrement. N’en parlons pas de passer à la télé.

Mais le foot est quand même empreint de follitude. Au milieu du terrain, parmi tous ces mecs habillés en vert et bleu, un mec en T-shirt rouge se pavanait. Il était comme la folle qui s’habille en noir pour venir à la soirée blanche le 31 décembre au Tango. En gros, la folle qui veut se faire remarquer. Et que dire de ces masses de muscles qui, à chaque fois qu’ils marquent un but (ou qu’ils en loupent un, ce qui arrive un peu plus souvent), se font des câlins, des bisous dans le cou et se tripotent le paquet. Leur coté folle ne s'arrête pas là. A chaque fois qu’ils font une petite chute de rien du tout, c’est le drame. Ils se tordent par terre, se crispent, hurlent, font des grimaces, se relèvent péniblement, boitent pendant deux secondes et vont vers leurs copains pour avoir des mamours. De temps en temps, il y a même un médecin qui vient voir s’ils ont des bobos ou pas. J’ai fait un bond de dix centimètres au moins et poussé un cri digne du whistle note Mariah Carey dans “Emotions” lorsque l’amie en question s’est exclamée “Tiens, Madonna ! Il passe son temps à se signer”. Madonna ? Sur un terrain de foot ? Elle se signe ? Trois phrases incohérentes lorsqu’elles sont juxtaposées. Bannissant l’excellent vin corse de mon système, je concentre mon attention sur l’écran et je vois le vieux barbu que j’avais vu récemment courant comme moi à l’annonce de la collection Jimmy Choo chez H&M. Erreur de compréhension, elle parlait de Maradona, celui qui avait pleuré lorsque son équipe avait perdu la coupe en 1990. Le même Maradona qui a remplacé Madonna sur la pub Vuitton (même en haute couture, ils tombent dans le ridicule des fois...).

Et a-t-on déjà vu une équipe plus folle que l’équipe de France ? Elle est pour les hétéros ce que le calendrier des dieux du stade est aux homos, mais cela ne l’empêche pas d'être toujours au centre des palabres bas de gamme. On n’a jamais autant entendu parler de foot dans le Marais que cette année. Entre leurs déboires sexuels pathétiques, leurs grèves, leurs potins, les invectives que les joueurs se lancent entre eux, les folles cancanières ont eu leur part de Coupe du Monde.

Personne n’est resté indifférent à l’affiche de “Sex and the City 2” avec le slogan “Talons vs Crampons”, qui a fait que toutes les folles se sont ruées dans les salles pour revoir le film pour la énième fois. L’image qui illustre le slogan est une magnifique chaussure argentée, avec un talon aiguille interminable écrasant un ballon de foot. Mais est ce que toutes les folles sont anti-foot ? Je parle bien de folles, pas les “hors milieux”, qui, pour faire le plus hétéro possible, se forcent à aduler le foot. Non, il y a bien des folles qui aiment le foot. Pourquoi cette fascination pour des mecs sapés comme Boutin ? Comment font-elles pour rester devant la télé, trois fois 1h30 quotidiennement pendant la coupe du monde ? 

Petites parenthèses pour décrire la folle qui regarde le foot. A contrario des hétéros imbibés de bière qui hurlent comme les “artistes” de Rammstein à chaque fois qu’il se passe quelque chose ou qu’il ne se passe rien sur le terrain, la folle regarde le foot comme Anna Wintour contemple les collections pendant les défilés à Paris - impassible, un petit air de dédain et sans la moindre expression. Elle nous laisse en compagnie des insupportables, interminables et incessants débits verbaux des journalistes sportifs. 

Après une petite investigation, j’ai appris pourquoi certaines d’entre nous aiment le foot. Il n’y a que nos consoeurs qui peuvent aimer le foot pour les bonnes raisons, par exemple, c’est un sport qui développe l’esprit d’équipe. De plus, les joueurs font souvent preuve de don de soi, et sont contraints à considérer les autres avant de prendre une décision. Pour la folle, le foot reste avant tout un beau spectacle, avec Shakira à l’ouverture. n’est pas seulement un sport, mais aussi un jeu international : ça permet aux pays du monde entier, même les pays asiatiques, de se rencontrer et le temps d’un match, jouer le même jeu avec les mêmes règles... Les cotés négatifs : les bagarres entre supporters et la face financière ne l’atteignent pas. Elle apprécie le foot pour ce qu’il est à la base, un sport collectif.

Mais le point de vue de toutes les folles, les pédés, les homos et les gays (mais pas les hors milieux) se rejoignent sur le fait la coupe du monde de foot est bien quand même : sans elle, nous n’aurions pas eu droit à Waka Waka.