Les Chroniques de Candy

Les temps changent

Sur les conseils de ma belle fille, j’ai décidé d’aller voir Raiponce par une nuit pluvieuse à Marseille. Habillée très sobrement comme à l’accoutumée, je pénètre dans la salle de cinéma en compagnie de mon beau monsieur. Dans la salle, à cette heure tardive, quelques couples, une gamine et une maman. Nous nous installons, et le film débute.

 

Qu’on ne s’y méprenne pas, j’ai beaucoup aimé l’histoire. La reine (oui, c’est un Walt Disney), étant enceinte, tombe malade et est guérie grâce à une fleur magique provenant du soleil. Cette fleur, un hibiscus à paillettes dorées, a aussi la propriété d’agir comme le botox, avec l’avantage de la rapidité et la précision. Du coup, la magie de la fleur est transmise à la chevelure de la princesse à sa naissance. Malheureusement, elle est kidnappée par celle qui veillait sur la fleur pour adoucir ses rides sans ressembler à Orlando, la soeur momifiée de Dalida. L’infante est séquestrée dans une tour sans entrée. La chevelure de l’altesse qui s’ignore pousse avec elle, et sert de corde à la kidnappeuse pour monter chez elle. Pendant son temps libre, elle lit et fait des fresques sur les murs. La veille de ses dix huit ans, la princesse s’enfuit en compagnie d’un voleur pour assister à la nuit des lanternes au Royaume. Après maintes pérégrinations, elle retourne chez sa fausse mère, pour ensuite se rendre compte qu’elle est de sang royal car elle s’est reconnue sur un mosaïque en ville. Elle défie la vieille, sauve son amant qui était venu la retrouver et repart vivre sa vie de princesse. Classique, me direz vous.

 

Pas du tout ! Rapoince, c’est un dessin animé de folles. De mon temps, les princesses Disney étaient des jeunes filles de quinze ans  (la plus âgée étant Aurore, seize ans) tranquilles et sages, subissant sans broncher les tyrannies de reines jalouses ou autres belles-mères, jusqu’à ce que leurs princes charmants viennent les libérer. Aujourd’hui, paranoïa contre la pédophilie oblige, Raiponce a dix huit ans. Et au lieu d’attendre en languissant dans sa tour qu’on vienne la sauver, elle va se compromettre dans les bois avec des garçons de petite vertu. Certes, elle a des états d’âme, mais continue son chemin tout de même. Elle se bat même contre des méchants avec une poêle. Pas très classe pour une fille de roi. Révolu, le temps de ces gentilles princesses qui baissaient les yeux devant les étrangers ! 

 

De plus, la modernité fait qu’elle ose aller s’aventurer dans un pub de bears gays. Un bar de rustres, gros, poilus, moustachus, s’imbibant de bière, mais qui ont des rêves assez louches : l’un arbore une bouche de geisha et se voit déjà mime, l’autre rêve de devenir pianiste, un troisième aspire à fonder un foyer après s’être fait refaire le nez. Ou encore un qui aime tricoter au coin du feu. Ils nous racontent leur envies en chantonnant des chansons de midinettes. Mais la plus homosexuelle de tous, c’est la méchante sorcière kidnappeuse. Une commère qui ne veut vieillir à aucun prix, habillée en robe prune moulante avec un décolleté plongeant. Avoir une telle fille, qui fait économiser la coloration et efface les rides sans bistouri, c’est un bonheur. Je comprends tout à fait son désarroi lorsque cette dernière fugue, avec un forban de surcroît. D’accord, il est beau et a de jolies fesses. Mais une fille qui ne se fie qu’au physique ne peut être une fille tout à fait respectable, toute princesse qu’elle soit.

 

Parlons des cheveux de cette fille au sang bleu, exploitée jusqu’à sa majorité. Avoir des cheveux comme Raiponce est le rêve de toute folle. On ne tomberait jamais malade, jamais de gueule de bois, pas de calvitie, une couleur toujours étincelante, pas de rides ni de cheveux blancs, et évidemment, une longueur de cheveux à se faire remarquer dans toutes les boîtes. A la fin du film, alors que le brigand-lover, blessé par La Méchante est mourant, il refuse que sa dulcinée sacrifie le restant de ses jours à sa belle-mère pour sa vie, et lui coupe les cheveux avec un morceau de miroir brisé. Et hop, elle à un super dégradé, le genre de coupe que le coiffeur prend trois heures à faire. Sans compter la couleur, car elle passe instantanément de blonde platine à châtain foncé. Il meurt, la marâtre finit en poussière, et Raiponce pleure ses cheveux et son amant. Une larme tombe délicatement sur lui, et là, magie, dans un jeu de lumière délirant- des rayons jaunes émanant de sa blessure, tournoyant jusqu’à remplir la pièce, une fleur de lumière blanche au milieu de tout cela - il se réveille. Quel ravissement, être princesse avec des tels pouvoirs de beauté.

 

Bref, un Disney moderne, avec une princesse qui ne pourra pas se vanter d’être aussi mignonne et profonde que ses aïeuls, mais rigolotte et téméraire quand même.




28/06/2012
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 30 autres membres