Les Chroniques de Candy

Merci Jeanne

Se réveiller un mardi pour aller en cours à neuf heures a toujours été un supplice. Tous les lundis soirs, je dois me préparer psychologiquement, avec quelques grammes d’alcool. Mais ce lundi soir, je me suis endormie excitée et joyeuse, même si je savais que le lendemain je devrais me réveiller plus tôt, car c’était le jour de la mise en rayons de la Collection Lanvin pour H&M.

 

A sept heures, je suis debout. Habillage express - slims, veste noire, doudoune argentée et sac taille XXL Longchamp en prévision des achats - je sors affronter le froid et la pluie mais qu’importe, le bonheur n’est pas loin. Devant H&M à huit heures, il y a déjà une file de taille aussi monstrueuse que les gens qui la composent. Un vigile vient me dire qu’il y a une heure et demie d’attente. Soit, les cours attendront. Ce n’est que lorsque je lui demande à combien d’articles j’ai droit et qu’il me répond que les achats ne sont pas limités que je commence à paniquer. Je décide donc d’user de mes charmes pour la bonne cause : sauver quelques pièces de cette collection de ces gens qui ne pourront jamais les porter comme il se doit. La file est composée à moitié de mecs (évidemment pédés, un hétéro ne ferait jamais la queue pour des vêtements) et l’autre moitié de filles. Je passe donc devant, repère une fille assez nunuche et commence à lui parler, me plaignant de mon retard, inventant des contrôles de profs méchants et horribles et la complimentant sur son écharpe dégueulasse. Un quart d’heure de bienséance après, elle me cède sa place. Le vigile ouvre les portes, je rentre, dignement, alors que les autres s’engouffrent. A l’intérieur, encore un quart d’heure d’attente, juste devant les rayons où ces créations sont exposées. Je serre mon poing autour des anses de mon sac, et me concentre sur la tâche qui m’attend, telle une panthère se préparant à se jeter sur sa proie. Mon oeil de lynx repère déjà les quelques pièces les plus intéressantes. Le vigile nous laisse passer, et là, on m’annoncerait la mort de Mylène que je n’aurais pas changé de plan d’action.

 

Comme me l’a enseigné ma Marraine, pour faire du shopping, le plus important, c’est d’avoir l’oeil : mon premier choix est un tshirt écru, avec un col bleu marine orné d’un grand morceau de tulle noir. Dessus est imprimé une paire de jambes en bas résilles et des chaussures, qui sont recouvertes de strass. Taille S, hop, j’embarque. L’esprit de ma Marraine avec moi, je me retourne et me dirige droit vers une fourrure. Si Doris Day était un manteau, elle aurait été celui là. Marron, arrivant à mi mollets et ornementé de boutons dorés. Un col taillé en pointe. Au moment où je le prends, une créature féminine a le même réflexe. Mais étant un peu plus rapide et brutale, je le lui arrache doucement des mains et lui souris. En une minute et demie, j’ai tout ce qu’il me faut. Je me mets en quête d’une robe pour ma belle-soeur, une des seules filles hétéro que je connaisse qui peut se vanter de savoir porter de la couture. Les leçons de Marraine aidant, je répère une robe noire, arrivant à mi jambes, avec un décolleté asymétrique. Des manches courtes bouffantes et une ceinture élastique maintenant les pans du drapé ample qui constituent le haut de la robe. Je l’imagine déjà la portant, faisant pâlir les autres espèces de ses semblables. Je vais la prendre, deux secondes avant la dame du manteau. Quatre minutes se sont écoulées, et j’ai déjà tout. Je me demande pourquoi les autres ont besoin de quinze minutes. Peut être parce qu’ils n’ont pas eu la même formation que moi en matière de repérage ? Je pose le tout par terre sur mon sac pour regarder les chaussures. Pas terribles à cause des finitions assez grossières. Et là, la dame du manteau contre attaque. Elle se baisse et prend la robe noire. Ebahie, je lui fais remarquer que c’est à moi. Elle réplique avec sa voix de casserole que c’est par terre, donc à tout le monde. Je fais appel à une vendeuse, qui confirme, gênée, que j’aurais dû la garder en mains. Pour ne pas faire de scandale, je décide de la laisser partir avec, mais en lui faisant remarquer qu’elle devra farcir des années de régime avant de pouvoir, ne serait ce que tenter de passer une jambe dans la robe. Je choisis une jupe noire en dentelle pour ma belle soeur, en maudissant la dame qui m’a pris la robe que jamais je ne retrouverai.

 

Dans la file à la caisse, elle est juste devant moi. Je me demande si j’attends d’être dehors pour l’attaquer et reprendre mon dû, ou si je me contente de l’insulter. Et là, erreur fatale dont elle s’en mordra les doigts toute sa vie, elle pose son panier d’achats par terre pour chercher son porte feuille. Je me baisse en moins de temps qu’il me faut pour m’asperger de Poison le matin et récupère la robe. Elle se retourne, horrifiée, et voit mon sourire triomphant. Je lui fais remarquer que c’était par terre, donc à tout le monde, comme l’avait précisé la vendeuse, et tiens, prends toi ça dans la tronche.

 

Je paye mes achats, au grand désespoir de mon mari qui trouve que je suis trop dépensière, mais là, je suis certaine qu’il m’aurait compris, car Lanvin reste Lanvin !



28/06/2012
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